
Un préservatif qui change de couleur en détectant une IST ? Innovation, chiffres, humour et prévention : découvrez le S.T.EYE, l’idée folle de trois ados.

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On connaissait les préservatifs parfumés, phosphorescents, extra-fins, nervurés… mais en 2015, trois adolescents britanniques ont eu une idée autrement plus révolutionnaire : un préservatif qui change de couleur s’il détecte une infection sexuellement transmissible.
Imagine la scène : tu déroules ta capote et elle vire au vert, au bleu ou au violet. Pas besoin d’un doctorat en microbiologie, le latex fait le diagnostic en direct. Gênant ? Probablement. Utile ? Potentiellement révolutionnaire.
Et ce n’est pas un mythe, c’est une réalité depuis quelques années. Je vous présente donc l’histoire d’une invention insolite, mais qui pose de vraies questions de santé publique à l’heure où les IST explosent.
Une invention née sur les bancs du collège
À seulement 13 et 14 ans, Daanyaal Ali, Muaz Nawaz et Chirag Shah, trois élèves de l’Isaac Newton Academy (Ilford, Essex), conçoivent en 2015 le S.T.EYE (jeu de mots entre « STI » – infections sexuellement transmissibles – et « eye », œil).
Leur préservatif intelligent, recouvert de molécules spécifiques, réagit chimiquement au contact de bactéries ou virus et change de couleur :
- Vert : chlamydia
- Jaune : herpès
- Violet : papillomavirus (HPV)
- Bleu : syphilis
👉 Discret, sans douleur, et surtout sans passer par l’étape stressante du médecin. Résultat : les trois ados remportent le prix « Santé » des TeenTech Awards, une prime de 1 000 £ et même une invitation à Buckingham Palace.
Une belle récompense pour une idée qui avait à la fois le charme de la simplicité… et le potentiel d’un séisme sanitaire.
Comment ça marche (en théorie) ?
Le principe repose sur les anticorps intégrés au latex. Lorsqu’ils rencontrent les antigènes des infections, une réaction chimique se produit, changeant la couleur du préservatif. C’est le même genre de réaction qu’on retrouve dans certains tests rapides (type ELISA pour le VIH).
Facile sur le papier, beaucoup plus complexe en pratique. Il faut garantir une fiabilité scientifique sans faux positifs ou négatifs, tout en utilisant des produits non irritants pour les muqueuses. Et puis, question bête : que se passe-t-il si ton partenaire est porteur de plusieurs IST ? Arc-en-ciel garanti ?
Une innovation brillante… et controversée
Forcément, l’idée a déclenché enthousiasme et scepticisme.
D’un côté, c’est la promesse d’un dépistage immédiat, discret et non invasif, un formidable outil pédagogique pour les jeunes, et une piste pour démocratiser le dépistage.
Mais de l’autre, les critiques fusent. On imagine facilement la scène gênante d’une capote qui vire au bleu au pire moment possible. S’ajoutent à cela des questions éthiques (droit à la vie privée, gestion de l’information intime en direct), la fiabilité encore fragile du dispositif, et même un effet psychologique pervers : la peur d’utiliser un tel préservatif par crainte du verdict.
Le Dr Mark Lawton (BASHH, UK) et Michel Bourrelly (CRIPS, France) ont tous deux souligné ces limites. Gadget séduisant, oui, mais pas forcément réaliste dans la vraie vie.

Photo Cottonbro
Où en est-on en 2025 ?
Dix ans après son buzz, le S.T.EYE n’a toujours pas atterri dans les rayons de ton supermarché. Mais il reste un prototype emblématique régulièrement cité dans les concours d’innovation.
La recherche, elle, avance : les tests rapides IST sont de plus en plus fiables, les préservatifs connectés existent (plutôt pour mesurer la “performance”), et les capotes biodégradables, vegan ou high-tech se multiplient.
Bref, le préservatif caméléon reste un fantasme scientifique… mais qui a eu le mérite de remettre le dépistage au centre des discussions.
Les IST : un problème mondial en plein boom
Derrière l’humour, les chiffres sont clairs : les IST ne sont pas un vieux souvenir des années 90, mais une urgence sanitaire actuelle. L’Organisation mondiale de la santé estime qu’un million de personnes contractent une IST chaque jour dans le monde. En France, Santé publique France constate une hausse continue depuis les années 2000.
Certaines maladies qu’on croyait en voie de disparition font leur grand retour, comme la syphilis, quasi effacée dans les années 90 et qui connaît depuis 2000 une recrudescence inquiétante, surtout chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. La chlamydia et la gonorrhée, elles, se propagent surtout chez les jeunes adultes, souvent sans symptômes visibles. Quant au VIH, il reste une réalité bien ancrée : environ 6 000 nouvelles infections chaque année en France, dont une part significative concerne les moins de 30 ans.
Pourquoi ces chiffres explosent-ils ? Parce que le préservatif, jadis perçu comme une évidence post-crise du sida, a perdu de sa popularité. Beaucoup de jeunes adultes privilégient le confort immédiat au détriment de la sécurité. Les applications de rencontre multiplient les occasions de contacts rapides, mais pas forcément de discussions sérieuses sur la prévention. Ajoute à cela un manque de dépistage régulier – par négligence, peur du jugement ou simple méconnaissance – et tu obtiens la recette parfaite pour un rebond massif des infections.
Le problème, c’est que la plupart de ces infections sont silencieuses : pas de symptômes, pas de douleur, rien qui alerte. Ce qui n’empêche pas les conséquences d’être sérieuses : infertilité, complications chroniques, transmission du VIH facilitée. Autant dire qu’au-delà de l’innovation technologique, la vraie urgence reste l’éducation et l’accès simplifié au dépistage.
Pourquoi cette invention reste inspirante
Même si elle n’est pas encore commercialisée, l’idée du S.T.EYE reste un coup de génie pédagogique. Elle a fait parler des IST partout dans le monde, elle sensibilise en rendant le danger visible, et elle responsabilise sans jugement moral.
Et soyons honnêtes : si trois ados de 14 ans ont pu imaginer ça dans leur salle de classe, la science médicale peut sûrement aller encore plus loin.
En pratique : comment rester protégé aujourd’hui ?
En attendant la capote arc-en-ciel, le plus efficace reste encore les basiques : utiliser systématiquement des préservatifs masculins ou féminins, se faire dépister régulièrement, parler prévention avec ses partenaires (oui, la communication peut être sexy), et surtout ne pas attendre l’apparition de symptômes pour consulter. La majorité des IST sont asymptomatiques, et c’est bien là le piège.

photo klaus nielsen
Mot de la fin
Le préservatif qui change de couleur, c’est à la fois un gadget, un rêve scientifique, et un symbole. Gadget, car sa mise en pratique est encore loin. Rêve, car il pourrait transformer la prévention. Symbole, car il nous rappelle que les IST n’ont rien d’un sujet dépassé.
Alors, peut-être qu’un jour, dans ton tiroir de chevet, tu auras le choix entre la capote vanille, la capote vegan… et la capote caméléon. En attendant, protège-toi, fais-toi dépister, et rappelle-toi : la vraie couleur du sexe, c’est celle de la confiance et du respect.
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